Tiago nous raconte son art, ses techniques et la vie de son atelier. Lieu de partage où les échanges sont nombreux et les inspirations également. Je ne vous en dis pas plus, car je préfère laisser la parole à Tiago :
Que faites-vous dans cet atelier ?
Je suis artiste peintre et je fais pas mal de céramiques et de sculptures. Je ne suis pas céramiste à proprement parlé, j’aime sculpter la matière, et je dessine également.
Vous donnez des cours. Enseignez-vous toutes les semaines ?
Je donne des cours de sculpture et de pâte à modeler, mais pas de sculptures imposantes ou en bois car j’aimerais travailler le bois, mais je n’ai pas de assez place.
Combien d’élèves avez-vous ?
Maintenant, j’en ai quatre et certains sont français, certains sont portugais. Ce qui est intéressant parce que cela amène différentes personnes d’environnements différents. L’expérience du professeur est toujours enrichissante. J’apprends beaucoup avec mes élèves, et chaque élève apporte sa propre expérience.
Pouvez-vous nous dire qu’est-ce ces oeuvres en noir et blanc ?
C’est du scratch, j’aime bien sculpter et même sur papier. La surface est complètement noire et ensuite je gratte la surface avec une épingle, une aiguille ou un ciseau.
C’est comme de la linographie ?
En quelque sorte, mais le médium est simplement du papier, avec un carton spécialement prévu pour. C’est le principe du transfert. C’est habituellement fait pour l’illustration scientifique, c’est une technique plus simple que la gravure et qui donne un effet de gravure.
Et de quel type d’art s’agit-il, car pour certaines pièces cela s’approche de l’art égyptien ?
Mon travail est un peu transversal à tout, donc j’utilise tout art dans mon travail comme le cinéma ou la littérature. J’apporte des influences d’arts multiples et je l’inclus souvent dans mon travail. C’est un peu une façon de voir le monde, c’est ma façon de voir le monde. Mon travail consiste à transmettre mon travail et j’aime toutes les techniques. Parfois, j’utilise la craie fusain, l’argile, de l’encaustique ou des pigments. Je réalise des pièces en détrempe, et c’est la technique la plus ancienne de la peinture. Les romains et les égyptiens sous l’empire romain, utilisaient la peinture par détrempe comme les portraits du Fayoum qui est l’art funéraire égyptien. Ces visages peints dans l’antiquité et trouvés dans la région égyptienne du Fayoum sont fabriqués avec cette technique. C’est une technique très ancienne et j’ai vraiment voulu garder des matériaux durables comme l’encaustique et les pigments naturels. Ces matériaux sont beaucoup moins toxiques que ceux de nos jours comme l’argile et la colle naturelle.
Vous aimez les anciennes techniques ?
J’aime bien les techniques stables comme le papier, le bois. Je n’utilise pas de résines et de plastiques, je veux rendre mon travail le plus éco-durable, il y a assez de pollution dans le monde. J’aime la force de l’art vulnérable et je veux voir mon empreinte digitale ou de pied sur l’œuvre.
On peut voir juste en regardant vos œuvres que vous aimez utiliser vos mains.
Exactement, c’est l’essence de mon travail. Quand tu es un sculpteur, tu dois toucher la pièce, il faut la dessiner, puis la faire en trois dimensions. Tu conceptualises aussi l’environnement autour de la sculpture. Avant de réaliser l’œuvre, il faut avoir la notion de l’espace, parce que c’est un objet 3D, et la taille joue aussi. Vous pouvez voir sous différents angles, cela change son impression. Cet effet peut-être différent selon où, vous vous placez autour de l’œuvre.
Vos sculptures en les regardant on dirait qu’elles sont en paix, très calmes.
Oui silencieux, peut-être que tu as raison parce que j’aime les gens qui méditent et se taisent. C’est l’histoire de l’intégrité de la personne, ce sont toutes les possibilités de nos voyages dans nos têtes. C’est comme un rêve, vous pouvez rêver de cette pièce. Je me pose la question : comment représenter un rêve dans une sculpture ? Cet état esprit m’aide.
Comme vous parlez d’inspiration littéraire, travaillez vous sur l’imagination au travers des histoires ?
J’aime beaucoup les histoires de Jules Verne ou de Jonathan Swift comme les voyages de Gulliver. Ces histoires restent avec moi comme un fil de conduite, je les mélange avec d’autres histoires, donc c’est comme une recette imaginaire qui prend forme. Comme les œuvres « Les lunes » que j’ai réalisé avec de l’argile et que je cire à la fin cela ressemble à de la pierre, alors que ce n’est que de l’argile.
Certaines de mes œuvres sont figuratives, d’autres plus abstraites, d’autres plus architecturales, d’autres plus symboliques. En fait cela dépend, il s’agit d’œuvres de différentes époques. C’est transversal parce que c’est ma vie, c’est la façon dont nous continuons à changer, à évoluer comme les œuvres. Nous changeons dans nos goûts et dans notre art.
Vous travaillez plus la sculpture ou la peinture ?
Les deux et j’utilise aussi du papier, je gratte le papier, parfois je colle le papier. Parfois aussi, je trouve du bois dans la rue, et je le ré-utilise comme objet recyclé. Mon travail concerne tout ce qui m’entoure, les peuples, les choses, les films. Je crée des histoires et même si mes oeuvres peuvent sembler dans le même thème, elles n’ont pas de lien les unes avec les autres. Ce sont des histoires et chacune essaie de raconter sa propre histoire. Chacun peut créer son histoire hypothétique.
Sur quoi travaillez-vous là en ce moment ?
Je modélise un corps humain. Je fais les propositions maintenant, c’est le début, c’est juste pour voir. Egalement, je m’inspire de vieux livres, ils sont toujours utiles les livres académiques. Je ne rejette pas l’académie. Je suis un artiste contemporain, mais je ne peux pas rejeter les vieilles techniques et les vieux savoirs. Comme les écrivains, il faut connaître les classiques pour avoir une écriture contemporaine, sinon, vous commencez juste à écrire de manière réaliste, mais qui perd en sens. C’est mon point de vue, je pense que nous devrions créer en ayant une substance.
D’accord un peu comme les beaux arts ! Vous ne travaillez pas comme certains artistes de manière isolé ?
L’art demande un travail très solitaire. Nous avons besoin de nous isoler dans l’œuvre , même si vous avez des gens autour de vous, c’est très solitaire. L’isolement artistique c’est intéressant parce que pendant la création, vous pouvez méditer. L’art demande de la méditation, c’est une bonne pratique que je réalise tous les jours.